29 septembre 2014 1 29 /09 /septembre /2014 17:16
Au lendemain des élections sénatoriales…

Au vu du résultat des dernières municipales et de la division de la gauche, le passage à droite du Sénat hier n’est pas une surprise. Mais cette défaite supplémentaire de la gauche n’en est pas moins inquiétante. Elle fragilise en effet le gouvernement qui aurait besoin, au contraire, de confiance.

De plus, dans ce scrutin indirect particulier dans lequel les élu·e·s ne votent pas en tant qu’individus mais représentent leurs électeurs, la question de la légitimité se pose lorsque certains grands électeurs s’affranchissent de leur responsabilité en votant dans l’isoloir pour une ligne politique différente de celle qu’ils affichent au grand jour. Je pense bien sûr à celles et ceux qui ont fait le choix d’élire deux sénateurs Front national en Provence-Alpes-Côte d’Azur, alors que le FN ne disposait pas seul des grands électeurs suffisant pour gagner des sièges. Les frontières entre droite et extrême-droite s’estompent donc ainsi, y compris chez les élus.

Comment analyser, par ailleurs, la décision de formations politiques de gauche de maintenir leurs listes — sachant pourtant fort bien qu’elles ne parviendraient pas à faire élire de sénateur — au risque d’offrir des sièges à la droite ? La crise est, à l’évidence, profonde à gauche. Et je veux ici sincèrement remercier les élu·e·s du Front de gauche et d’Europe-Écologie-Les Verts qui ont choisi d’aider l’unité de la gauche plutôt que la posture, et certainement permis dans les Bouches-du-Rhône l’élection de Samia Ghali. Sans eux, la gauche aurait disparu de la représentation sénatoriale de notre département.

Dans ce département, le constat est à l’image du résultat national.

La porosité entre l’UMP et le FN se vérifiera d’ailleurs encore ce soir, au conseil municipal d’Aix-en-Provence, où Maryse Joissains s’apprête à modifier le règlement intérieur dans le seul but, politique, de permettre au FN de constituer un groupe avec ses trois élu·e·s… alors qu’il y a quelques années elle avait refusé cette même modification pour un groupe de centre-droit.

La crise morale de la politique se confirme : la victoire de Jean-Noël Guérini en est l’exemple. Sorti du PS, il a mené sa campagne non pas sur une ligne politique digne d’un sénateur, ni même sur les valeurs qu’il prétendait défendre jusqu’à récemment, mais sur un pilonnage en règle du gouvernement (bien au-delà de la réforme territoriale d’ailleurs) agrémenté de méthodes clientélistes dont parlent certains élus eux-mêmes, visiblement peu choqués de participer à ce système archaïque et anti-démocratique.

Nous verrons d'ailleurs prochainement si ce système se limite aux seules Bouches-du-Rhône ou s'il s'étend bien au delà : l'État devra indiquer bientôt sa position sur certains dossiers locaux. Restera-t-il muet face aux intérêts et candidats amis de messieurs Guérini et Gaudin ? Jaurès disait « Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ; c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe » J’espère que le gouvernement, et aussi mon Parti, sauront s’en souvenir...

Il faut retrouver le chemin de la réflexion collective.

La crise de la gauche, la crise de la politique ne faibliront pas tant que certains élus et partis continueront de se regarder le nombril, de manœuvrer ici ou là sur le dos d’électeurs perdus ou en colère au lieu de mener les véritables débats dont notre société a besoin.

Il est temps d’organiser dans notre pays, en résonnance avec les États Généraux qu’organise aujourd’hui le Parti socialiste, des débats publics, accessibles : de véritables agoras politiques et philosophiques (car oui, il nous faut de la réflexion !), populaires, ouvertes sur la jeunesse, la diversité, la culture, la recherche, l’industrie,… Bref, ouvertes sur les réalités du pays.

Il nous faut retrouver une parole et plus qu’une parole, une voie de gauche, une entente non pas entre partis mais une entente entre citoyen·ne·s, sur ce que pourrait être une base commune. Car sans gauche unie, j’en suis convaincue, il n’y a plus de gauche. Sans capacité à dépasser les postures, comme nous savons pourtant le faire dans bien des exécutifs locaux, il n’y a pas moyen de mettre en œuvre ce pour quoi nous luttons de toutes nos forces. Sans position raisonnée dont la question principale doit être en ce moment « comment faire pour que le gouvernement réussisse ? » il y aura échec très durable d’un réformisme progressiste dans ce pays, au niveau national comme sur les territoires. Il y a donc urgence à nous rencontrer, à échanger, à travailler, à imaginer. Et ce « nous » en appelle à toutes celles et ceux, bien au-delà des cercles politiciens, qui souhaitent simplement participer de l’action que chacun-e peut avoir envers la res-publica.

Quatre axes de réflexion me paraissent essentiels :

  • La redistribution : alors que se développe un discours simpliste sur le « ras-le-bol » fiscal, reposons nous la question : qu’est-ce que l’impôt ? Pourquoi ? Pour qui ? Quel modèle fiscal devons ou pouvons nous construire ?

  • Le service public et le modèle social : à l’aune des changements sociaux et sociétaux que nous connaissons, quel est le rôle de l’État pour protéger les citoyen·ne·s ?

  • L’économie : à l’heure de la mondialisation, qu’est-ce qu’une politique économique de gauche, qui fonctionne pour le plus grand nombre ?

  • Notre identité républicaine et démocratique : comment redéfinir nos valeurs communes au XXIe siècle ? Quels liens entre les citoyen·ne·s et la chose publique ?

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commentaires

G
Merci très beaucoup pour ce post. Sympa.
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S
Bonjour,<br /> <br /> Je note avec soulagement que Mme Lenfant (et la fédération PS des bouches du Rhône ?) ne soutiennent pas l'élection de JN Guérini. Mais ce sont malheureusement de nombreux élus PS qui ont contribué largement à son élection. Personnellement j'ai l'impression d'avoir été dupé à chaque fois que j'ai mis un bulletin PS dans l'urne lors des dernières élections puisqu'il s'est souvent transformé en bulletin Guérini plus tard (élections au conseil général ou au sénat). Pour ma part, à la prochaine élection locale, sauf prise de position claire du candidat (comme vous le faites ici), je m'abstiendrai.
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